L’association de la chambre à coucher à des expériences négatives (transactions, conflits, débats) est un obstacle majeur à l’intimité.
« Je tiens absolument à régler les problèmes avant de m’endormir. »
« Ma mère m’a toujours dit qu’on ne devait pas se coucher fâché. Donc, on parle jusqu’à ce que le problème soit résolu. »
« On règle souvent les problèmes d’entreprise dans le lit. »
Comme plusieurs l’ont probablement expérimenté, la chambre à coucher se transforme parfois en salle de réunion ou se prend de petites… et de grandes décisions d’affaires. Ainsi, Luc m’a déjà confié, avec un brin de fierté dans les yeux : « C’est dans notre lit que j’ai convaincu ma conjointe d’acheter la terre du voisin ; je pense qu’elle était trop épuisée pour continuer d’argumenter. »
Or, la chambre à coucher devrait être un lieu réservé pour dormir, se reposer et à l’occasion pour des activités intimes. Mais qu’en est-il lorsque ce lieu est aussi associé aux discussions d’affaires, à l’argumentation, aux négociations et aux conflits ?
L’être humain fait constamment des associations. Chaque contexte a le pouvoir de susciter notre mémoire émotive où l’on a encodé des souvenirs. Notre cerveau ressentira de la joie, de l’excitation, du dédain, de la colère ou de la tristesse devant une personne, un lieu, une odeur ou une chanson. En fait, tout ce qui fait référence à des expériences passées génère chez nous des émotions d’intensité faible à forte allant de très positives à très négatives.
Par exemple, vous entendez une chanson et tout à coup vous devenez mélancolique ou joyeux. Vous voyez l’ex de votre conjoint et la moutarde vous monte au nez. Alors, imaginez un peu ce qui peut se produire quand la chambre à coucher, le lit et l’heure de dormir deviennent associés à des expériences négatives (transactions, conflits, débats). Cette association est un obstacle majeur à l’intimité.
De plus, comment penser que l’on peut régler tous les problèmes avant d’aller au lit ? Il y a des enjeux trop importants qu’on ne peut résoudre avant de s’endormir. Ceux-ci exigent un processus de réflexion qui prend plus que quelques heures. Par exemple : est-ce que l’on achète du quota ? Est-ce qu’on intègre le ou la jeune, quand et sous quelles conditions ? Est-ce que l’on construit une nouvelle étable ? Est-ce que l’on congédie l’employé ?
Finalement, une argumentation juste avant de s’endormir rend le sommeil beaucoup plus difficile, particulièrement chez l’homme. Celui-ci verra son rythme cardiaque augmenter d’une façon alarmante (jusqu’à 80 battements de plus par minute lors de conflits), sans compter qu’il mettra beaucoup plus de temps à se calmer que la femme (question de génétique).
Alors non, maman, on ne peut régler tous les problèmes avant de s’endormir. Et non, il n’est pas bon que votre lit devienne votre salle de réunion où se passe votre conseil d’administration. Car dans le lit, c’est votre conjoint qui doit s’y trouver, pas le patron, l’associé ou l’homme d’affaires.
Donc, préservez ce lieu d’intimité pour l’intimité. Assurez-vous d’avoir un temps et un lieu pour parler de sujets d’affaires importants qui suscitent souvent des émotions négatives. Alors, pour ceux qui, comme Luc, voudraient y gagner en « brassant des affaires dans le lit », sachez que vous y perdrez sur la qualité de votre sommeil, de votre couple, de votre libido et de celle de votre conjoint. C’est un pensez-y-bien!
par Pierrette Desrosiers, M.Ps, psychologue du travail, conférencière, coach d’affaires
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