Tous les traits de personnalité, lorsqu’ils deviennent rigides ou exprimés de façon exagérée, sont une souffrance pour soi ou pour son entourage.
En apparence, cette entreprise semble une entreprise très performante. Tout y est : une moyenne au-dessus de 12 000 kg de lait par année, des tracteurs qui brillent, de la machinerie et des champs en ordre et une étable impeccablement propre. Pourtant, rien ne va plus. Luc est épuisé, frustré de l’attitude des autres : son associé, ses parents, sa femme et ses enfants.
« Ils sont irresponsables, ils n’ont pas assez de hauts standards. On dirait que je suis le seul à vouloir réussir et à faire autant d’efforts. Si je n’avais pas été aussi exigeant, nous n’aurions pas une ferme aussi productive et si peu endettée. »
En effet, lorsque je rencontre son entourage, il est évident que Luc a des standards beaucoup plus élevés que tout le monde. Et il est vrai que sans ces standards, la ferme n’aurait probablement pas atteint ce niveau. Luc se voit comme prudent, ambitieux, soucieux des détails et possédant des objectifs professionnels élevés : de hauts standards de performance et de qualité, des principes moraux élevés et un grand sens des responsabilités. En fait, il semble posséder des traits essentiels pour atteindre le succès.
Toutefois, ce que Luc perçoit comme des qualités essentielles est perçu d’une façon différente par son entourage. Ses proches le perçoivent plutôt comme rigide, inflexible, entêté, sévère, intolérant, tendu, jamais satisfait, se noyant dans les détails, toujours sérieux, incapable de déléguer, d’exprimer de la joie ou tout autre sentiment positif.
« On n’en fait jamais assez, dit sa femme, ce n’est jamais assez bon ou l’on ne fait pas la bonne chose. « Si l’on arrive à 5 h 10 au lieu de 5 h à l’étable, c’est le drame, poursuit son frère. Si le balai n’est pas passé à la perfection, c’est encore le drame. Si l’équipe est satisfaite des résultats de la production, c’est que l’on n’a pas assez d’ambition. Il nous traite de “looser ”. Il veut tout contrôler. Il y a un grand roulement des employés, car ils n’ont jamais de rétroaction positive, juste des critiques. Ils se découragent et quittent notre entreprise pour aller sur une autre ferme. »
On peut donc constater que tous les traits de personnalité, lorsqu’ils deviennent rigides, exprimés de façon exagérée, sans nuance et souplesse par rapport au contexte, sont une souffrance pour soi ou pour son entourage.
Prenons l’exemple de vos cultures, la récolte étant vos objectifs, et l’engrais vos traits de personnalité. Pour avoir une récolte abondante, vous devez ajouter de l’engrais (persévérance, souci du détail, objectifs élevés, rigueur…), car, sans engrais, vous aurez un rendement très médiocre. Toutefois, si vous fertilisez trop, vous gaspillez votre argent (ou votre énergie). Et si vous le faites de façon excessive, vous ne récolterez plus rien (les autres se découragent, se révoltent, deviennent apathiques, épuisés ou abandonnent).
Voici quelques questions à vous poser pour déterminer si vous avez la juste dose d’engrais :
• Est-ce que les attentes ou les standards que vous avez sont réalistes compte tenu des ressources qui existent (compétences, intérêts, temps, ressources matérielles…), les vôtres et celles des autres ?
• Est-ce que les gens qui vous entourent sont stimulés et engagés, ou épuisés et découragés par les objectifs fixés ?
• Est-ce que le climat est positif ou si tout le monde est sur le qui-vive ?
Sachez trouver le juste dosage d’engrais, sinon vous risquez de retrouver un champ vide à récolter à l’automne. Un homme d’affaires prospère m’a confié un jour : « J’ai retenu deux leçons dans ma vie. La première, c’est qu’à vouloir tout contrôler, on ne contrôle plus rien. La deuxième, c’est que trop, c’est comme pas assez ! »
par Pierrette Desrosiers, M.Ps, psychologue du travail, conférencière, coach d’affaires
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