par PIERRETTE DESROSIERS, M. Ps.,

Psychologue du travail, conférencière, coach d’affaires

Martin me dit qu’il ne peut pardonner à son père d’avoir été aussi violent et dénigrant à son égard. « Il ne m’a jamais montré aucune marque d’affection et à chaque fois qu’il me parlait, c’était soit pour me dénigrer, soit critiquer ce que je faisais. J’ai grandi en pensant que je n’étais qu’un bon à rien, que je n’avais aucune valeur.

Aujourd’hui, même si j’ai une entreprise prospère je suis toujours fragile dans le fond. Je lui en veux d’avoir été aussi incompétent. Cela m’épuise et il y a des jours où j’ai de la difficulté à fonctionner. »

Martin réalise qu’il devrait pardonner à son père, car cette colère, cette haine et ce désir de vengeance le rongent littéralement par l’intérieur. Le coût de la colère est énorme. En fait, toute l’énergie psychique, physique et émotive consommée pour cette colère n’est plus disponible pour les autres sphères de votre vie. Ce sentiment handicape, contamine et peut avoir des effets hautement néfastes au sein de vos activités professionnelles, dont : l’efficacité au travail, la rentabilité, la productivité, mais également au niveau personnel comme sur ses relations, sa santé physique et psychologique et, en bout de piste, sur son bonheur. On ne peut en même temps entretenir de la colère et être heureux. Cela va de soi.

En réalité, les émotions négatives telles que la colère, la haine et la rancune sont comme un trou dans votre réservoir d’essence. Vous avez beau y ajouter du carburant, mais il y aura toujours une fuite importante. Et cette perte peut en ce sens vous coûter très cher.

Quand on a la rage au cœur, on entretient un lien intérieur négatif envers l’autre et très énergivore mentalement. Conséquemment, c’est seulement lorsque l’on réalise le coût de cette haine que l’on peut s’engager à pardonner. Pardonner, c’est rompre le lien qui nous unit à cette relation néfaste. C’est cesser d’investir notre énergie psychique dans cette relation. En somme, c’est la seule voie vers la paix d’esprit et le bonheur qui puisse être envisagée.

Mais pour ce faire, il faut tout d’abord accepter que l’être humain soit… humain : parfois faible, imparfait, bon, et dans certains cas peut agir de façon méchante.

On peut vouloir initier une rencontre avec la personne et, en toute franchise, lui exprimer ce que l’on ressent : « Je ne veux plus vivre ces sentiments négatifs entre nous, tous les deux nous perdons du temps qui pourrait être de qualité. J’ai réfléchi et je veux passer à autre chose. Je ne veux plus vivre dans la rancune ». En l’occurrence, si la personne est ouverte et semble vouloir aller plus loin, il y a là toute une opportunité de grandir pour les deux. Toutefois, il faut aussi se préparer à ce que la personne ne soit pas prête.

Nous n’avons nul besoin de l’autre pour pardonner, ni de son approbation. En fait, il n’est pas essentiel d’aller rencontrer la personne, celle-ci pouvant en un sens se trouver dans un état d’agressivité et donc indisponible à nous recevoir. Il arrive même que celle-ci soit décédée. Conséquemment, cette approche peut très bien se faire à son insu. Si nous attendons que la personne accepte notre pardon, nous sommes dépendants d’elle, jamais complètement libérés, puisque nous demeurons en attente de « sa » décision. Néanmoins, il se peut que l’autre n’ait peut-être pas fait son cheminement. Dans certains cas, elle n’est peut-être pas consciente de son geste offensant. Rappelez-vous que pardonner, c’est une démarche extrêmement personnelle et libératrice.

Certains écriront une lettre pour se libérer, sans toutefois jamais la faire parvenir à son destinataire. L’idée c’est de le faire pour soi, sans rien attendre en retour. C’est de retrouver sa liberté pour pouvoir vivre pleinement sa vie, sans boulet à traîner.

En conclusion :

« Le pardon est plus qu’un sentiment, c’est une force qui déclenche d’admirables effets » – Marcelle Auclair