« Quand je l’ai vu, j’ai tout de suite compris qu’il n’était pas vaillant. J’ai alors décidé de ne pas l’engager. Je me fie toujours à ma première impression, elle ne me trompe jamais… » C.B.

 

Eh bien Charlie, désolée de vous contredire, mais vous commettez probablement une grande erreur : votre première impression est en fait… une première impression. Tantôt elle est fondée, tantôt elle est faussée.

 

Nous avons tous, en tant qu’être humain, ce fâcheux réflexe de nous faire une impression rapide. En fait, plusieurs spécialistes estiment que nous mettons environ 30 secondes à nous faire une opinion de quelqu’un. Les plus généreux parlent de trois à quatre minutes, tout au plus. Quoi qu’il en soit, vous serez d’accord avec moi que c’est là bien peu pour juger de la valeur d’une personne, de ses compétences, de ses habiletés, de son intégrité et de son honnêteté.

 

Bien entendu, à l’occasion, nous visons juste. Nos expériences passées nous ont démontré à maintes reprises que notre petite voix intérieure ou notre intuition avaient tôt fait de nous convaincre de ne pas nous fier à la personne devant nous. Toutefois, comme être humain, nous avons tendance à oublier les fois où l’on s’est trompé. À cet égard, nous semblons tous souffrir, à un moment ou un autre, d’une mémoire quelque peu sélective… En outre, cette impression on ne peut plus « fausse » serait influencée par plusieurs facteurs : expériences passées (problèmes rencontrés avec un employé qui avait un percing dans le nez), préjugés (les Noirs sont tous paresseux, les femmes sont difficiles à gérer…), valeurs (les gens qui vivent en ville sont moins bien que ceux qui vivent en campagne), ainsi que divers facteurs qui n’ont pourtant rien à voir avec l’individu, en tant que tel. Il suffit que ce dernier ressemble à votre beau-frère (celui que vous détestez justement) pour qu’inconsciemment, vous l’éliminiez de façon automatique de votre liste d’employé potentiel.

Ce phénomène est d’ailleurs très connu, lors d’entrevues. Vous rencontrez un candidat à l’air nonchalant, qui mâche de la gomme et qui porte des jeans troués. Vous vous dites : « Encore un paresseux qui va se pointer au travail en retard et qui va probablement me voler. » À l’inverse, s’il se présente bien et qu’il est le fils de…, c’est presque gagné.

Et si nous avions tort, si notre première impression n’était pas toujours bonne ? Sans avoir côtoyé personnellement les dirigeants d’Enron, Conrad Black ou Vincent Lacroix, j’ai peu de peine à imaginer qu’ils étaient toujours bien vêtus, qu’ils devaient se présenter de façon polie, porter un parfum haut de gamme, être propres et avoir un langage soigné. De plus, ils étaient certainement très habiles à créer une première bonne impression. Était-ce pour autant un signe d’honnêteté, d’intégrité, de bonnes personnes à avoir dans son organisation ?

Vous avez sans doute connu de beaux parleurs, bien éduqués, élégamment vêtus et possédant de belles manières, qui sont en fait les pires arnaqueurs, prêts à vendre leur mère pour faire un peu d’argent.

Le problème, voire le danger de la première impression, est que, après celle-ci, l’individu cherchera à la valider et retiendra uniquement les informations qui vont dans le même sens, rejetant les informations qui viennent la contredire.

Bref, il n’est pas nécessaire de rejeter d’emblée notre première impression, mais plutôt de reconnaître que l’être humain peut lui-même se piéger à travers ses propres filtres. On peut alors passer à côté de belles occasions de connaître des gens ou, à l’inverse, de se faire embarquer dans de beaux draps en raison de notre « intuition ».

 

Alors, la prochaine fois que vous croyez être « certain » de quelqu’un, après seulement 30 secondes d’entretien, demandez-vous ceci : et si j’avais tort, quelles en seraient les conséquences ?

 

par Pierrette Desrosiers, psychologue

Conférencière et coach d’affaires