La dépression chez les hommes: une bête noire mal comprise
Que doit-on savoir sur la dépression chez les hommes et comment adapter la thérapie?
Pour plusieurs hommes, accepter de demander de l’aide et de parler de ce qui ne va pas, c’est comme de dire “j’ai échoué, je ne suis pas assez bon et je ne suis pas assez fort”. La dépression est bien connue chez la gente féminine, mais est un enjeu beaucoup plus tabou chez les hommes. En s’avouant dépressif, l’homme n’incarne plus le stéréotype de l’homme fort que la société lui a imposé.
Stéréotype de l’homme fort: un modèle utile pour notre société?
Depuis longtemps, le modèle de l’homme fort et viril est mis de l’avant dans la société. Paradoxalement, on véhicule le message à l’homme que c’est acceptable de pleurer et que l’on veut qu’il exprime ses sentiments, alors qu’on lui demande aussi d’être solide et fort comme du rock. L’homme doit toujours être en contrôle et être tout puissant. Lorsqu’il est victime de la dépression, il lui est alors plus difficile de s’avouer ‘vaincu’, d’afficher sa vulnérabilité et d’admettre qu’il a perdu le contrôle.
Les deux principaux facteurs de risques qui peuvent faire sombrer l’homme dans la dépression
Chez les hommes, on remarque que les deux principaux facteurs qui peuvent déclencher une crise ou un haut niveau de détresse psychologique sont l’échec professionnel et l’échec amoureux. La perte de la conjointe est une période extrêmement difficile où l’homme est plus sensible à souffrir d’une dépression si celui-ci possède d’autres facteurs de risques. De plus, dans 80% des cas, c’est la femme qui décide de quitter son conjoint.
Le déni: un mécanisme de défense
Quand l’homme est en dépression, il peut nier ses symptômes sur une longue période ce qui nuit à la recherche de solution. Boris Cyrulnik souligne que durant cet état de détresse, l’homme a tendance à s’isoler, ce qui contribue à aggraver sa situation. Il n’a pas de confident et ne participe pas à des activités simples et apaisantes. Il ne lui reste que la rumination, l’alcool ou l’explosion pour s’évader. J’ajouterais certainement le travail dans bien des cas.
Le sentiment de la honte peut nuire au travail sur soi
Selon l’auteur Gilles Tremblay, la honte, « cette émotion qu’on retrouve souvent dans le travail thérapeutique avec des hommes, conduit souvent à un profond malaise qui mine la relation d’aide en suscitant d’importants mécanismes de défense ». Les interventions auprès des hommes doivent donc être ajustées pour tenir compte de cette réalité.
L’importance d’adapter la thérapie pour les hommes
Les hommes présentant des valeurs masculines traditionnelles : performance, force, autonomie, indépendance, restriction émotionnelle et qui valorisent le travail ont plus de difficultés à demander de l’aide et à reconnaître leur vulnérabilité. Plus les valeurs sont ancrées, plus ils ressentent la honte. Les intervenant doivent tenir compte des différences hommes-femmes lors de leurs interventions.
Les hommes aux valeurs traditionnelles attendent davantage pour consulter pour des problèmes de santé mentale et physique. Je dis souvent à mes clients, “lorsque vous avez un problème avec votre voiture, vous allez voir le garagiste”. Quand vous avez un problème avec vos émotions et vos relations, vous pouvez également demander l’aide d’un expert sur le sujet. Il faut se rappeler que si la vie était si simple, il n’y aurait pas de psychologue. Comme me disait un homme d’affaires ayant réussi, « accepter d’être fragile, c’est aussi un signe de force de caractère ».
L’être humain est complexe. La pression sur la performance imposée par la société est constante et ne contribue pas à améliorer la situation chez les individus. Il est très difficile de garder un équilibre dans un monde performance, d’image, de consommation et de changement.
“Avoir honte de changer, c’est avoir honte d’être humain.” Source inconnue
par Pierrette Desrosiers, M. Ps.
Psychologue, conférencière, formatrice, coach d’affaires et auteure
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